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Réginald Boulos demande à Jovenel Moïse de remettre sa démission

Port-au-Prince, le 4 juin 2019

Son Excellence Monsieur Jovenel Moïse

Président de la République

Monsieur le Président,

Suite à la colère et la frustration exprimées par le peuple haïtien les 6, 7 juillet, 17 octobre et 18 novembre 2018, je vous avais confidentiellement envoyé, le 19 novembre 2018, une proposition de sortie de crise. Je tiens, toutefois, à vous rappeler que, non seulement vous l’avez complètement ignorée, mais, elle a été bizarrement diffusée, en partie, et livrée aux critiques acrimonieuses et combien irrationnelles des tenants zélés du pouvoir.  L’un de vos conseillers s’acharnait à dire : « Ti Mari p ap monte, Ti Mari p ap desann, Ti Mari la pou senkan. »

Il nous est, aujourd’hui, désespérant de constater que, pour la population haïtienne, « Ti Mari monte, Ti Mari desann ». La sévérité de la crise donne le vertige. Nous sommes tous comme embarqués, malgré nous,  dans une montagne russe à hauts risques. La situation économique et politique du peuple haïtien devient de plus en plus alarmante face à l’insécurité grandissante et l’inflation galopante (17,7 %, un record).

Ma proposition de novembre 2018 prévoyait, entre autres, des négociations sérieuses avec tous les acteurs politiques, économiques et sociaux en vue de trouver une solution à la grave crise qui secouait déjà le pays. Cette solution incluait les éléments suivants inscrits dans une période de transition, dirigée par, vous,  le président de la République :

Réduction consentie par le chef de l’État de la durée de son mandat ;

L’organisation de vrais « états généraux de la nation »;

Le renvoi négocié du Parlement ;

L’organisation d’une Assemblée constituante en vue de doter le pays d’une nouvelle Constitution ;

Des actions concrètes pour lancer de manière impartiale le procès PetroCaribe;

La formation d’un nouveau « Gouvernement de Salut Public » doté de pouvoirs exceptionnels ;

Des actions d’envergure portant sur la lutte contre la corruption et la contrebande.

Monsieur le Président,

Si, en novembre 2018, vous croyiez, peut-être, avoir d’autres voies pour sortir le pays du bourbier, il nous est, à présent, donné de constater que les choses ont drastiquement changé et que vos marges de manœuvre sont excessivement limitées. Vous avez erré dans votre interprétation cérémonielle et strictement procédurale de votre mandat présidentiel. Votre indifférence à l’égard des misères du peuple haïtien est surprenante. Le pays fait douloureusement les frais de votre inaptitude à saisir la crise dans sa dimension dramatique, et, aussi, de votre entêtement à vous enfermer dans l’aveuglement et le myopisme de ces cavaliers de l’apocalypse qui vous accompagnent.

Monsieur le Président,

Vous vivez dans l’illusion d’un pouvoir qui n’existe plus. Si, en 2015 et en 2016, je vous ai soutenu, de bonne foi, dans votre marche à la présidence,  je dois maintenant avouer mon amertume et ma déception. Le moment est venu pour moi de reconnaître que j’ai été dans l’erreur pour avoir autant cru en vos potentiels et votre bonne volonté.

Vous êtes, par ailleurs, cité, dans le dernier rapport de la CSC/CA sur l’utilisation des fonds PetroCaribe, comme étant personnellement et profondément impliqué, dans des crimes financiers pour subtiliser l’argent du peuple haïtien. C’est scandaleux ! Les vols et autres crimes associés à ces fonds, particulièrement durant le règne du tandem Martelly/Lamothe, constituent la plus grande injustice faite à notre peuple par ses élites politique et économique. Ces révélations devraient vous amener, si l’on en juge par vos propres déclarations,  à vous rendre disponible pour la justice de notre pays, encore que notre justice soit elle-même avilie, soumise aux diktats du pouvoir exécutif et arbitrairement dessaisie de son indépendance.

En ces moments décisifs et menaçants de la vie de la nation haïtienne, je doute que ma proposition du 19 novembre 2018 puisse encore aider à nous éviter ce chaos qui semble de plus en plus imminent. Je vous exhorte d’initier un processus devant amener rapidement à une transition politique qui s’ouvrirait avec votre démission comme président de la République. Une transition durant laquelle le dialogue national pourra être initié, une nouvelle Constitution adoptée, des réformes importantes engagées et le procès PetroCaribe enfin démarré sans les obstacles que vous avez vous-mêmes érigés durant vos deux années de pouvoir.

Dans l’attente de votre démission formelle dans un délai ne dépassant pas 90 jours, il est urgent, dans l’immédiat, de :

Rapporter l’arrêté nommant le gouvernement illégal et illégitime de Monsieur Jean Michel LAPIN ;

Renvoyer l’actuel Conseil électoral provisoire (CEP) illégal ;

Faciliter le démarrage d’un dialogue indépendant entre les secteurs politiques, sociaux et économiques du pays en vue d’adopter un pacte de gouvernabilité et de définir la feuille de route du pouvoir de transition ;

Nommer un nouveau Premier ministre sur les recommandations des parties engagées dans le dialogue proposé au point 3.

Monsieur le Président,

Les mesures proposées ici  ne sauraient souffrir de manœuvres dilatoires ni des stratégies de l’esquive et de la diversion qui ont marqué votre mandat.  Il faut vous décider aujourd’hui et maintenant.  Sinon, l’histoire retiendra que vous n’aviez pas eu la profondeur d’esprit ni la vision du temps long qui définissent les grands hommes d’État ; que vous n’aviez, non plus, su vous élever à la hauteur des espérances et des aspirations du peuple haïtien ; et qu’il vous manquait pathétiquement de grandeur en ces moments difficiles et douloureux pour notre pays.

Recevez, Monsieur le Président, mes salutations patriotiques.

Dr Réginald Boulos

Citoyen engagé

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